Compagnie des Indes
Le Boullongne (39)
Flûte de 600 tx. (1759-1761)
Olivier Bello
Avant
de réaliser les différentes cabines qui composent le clavecin, on va mettre en
place les couronnes de coins qui assureront la stabilité des deux mâts
principaux au niveau du premier pont. Elles sont fabriquées sur le même
principe que les pièces de futaille, avec tout d'abord la mise en forme du
contour extérieur, suivi d'un évidement intérieur, fait en premier lieu au
tour, et affinées par ponçage intérieur pour parvenir au diamètre du mât
correspondant.
Leur
installation est rendue possible par le fait que les étambrais de ces deux mâts
ne sont pas encore posés au niveau du deuxième pont. La fixation définitive est
assurée par quelques points de colle à prise rapide sur la face inférieure de
la partie débordante de ces coins.
Un
autre travail consiste à constituer les étambrais des deux bas-mâts les plus
grands sur le second pont, ainsi que celui du bas-mât de misaine sur le
gaillard d'avant. Ce dernier ne pose pas de problème particulier, et il est
surmonté d'une couronne de bois qui correspond au diamètre du bas-mât avec un
léger espace supplémentaire, sa juste épaisseur étant obtenue par ponçage de la
face inférieure avant de la coller sur l'étambrai.
Le
cliché ci-dessous présente une mise en place provisoire de ce massif pour son
ajustement avec le plancher du gaillard d'avant, car le chevillage montrant
l'installation définitive n'est pas encore réalisé.
Par
la suite, une sorte de gaine en cuir foncé sera clouée sur la couronne et
entourera l'ensemble du bas-mât pour s'opposer à toute infiltration d'eau en
direction du second pont.
L'étambrai
du grand bas-mât en avant de la limite du gaillard d'arrière est un peu plus
délicat à mettre en oeuvre car il devra être percé à quatre reprises pour le
passage de la partie haute des pompes, faites je le rappelle en plusieurs
éléments, et ceci dans un parfait alignement avec la partie basse.
Avant
de coller cet étambrai équipé de sa couronne, on prendra le soin d'insérer des
tourillons en métal qui permettront de coller sans problème la partie
supérieure de chacune des quatre pompes.
A
ce sujet, on note que les deux bâtons de pompe les plus proches du gaillard
d'arrière sont en bois et munis chacun de deux taquets qui se font face, alors
que les deux autres sont métalliques et équipés d'une poignée de même nature
qu'il faut bien entendu souder sur l'axe selon le procédé habituel. Ceci est
assez logique puisque deux des pompes sont dites " à la royale", les
deux autres étant entièrement en bois.
Suite
à ces travaux, toute une série de panneaux doit être fabriquée: en premier
lieu, celui qui sert de passage au câbles des ancres. Ceci est rendu possible
grâce à de larges échancrures de forme arrondie dans le coin extérieur et
antérieur de chacun des deux éléments. De plus la manutention se fera avec de
fortes boucles.
Il reste
encore deux grandes écoutilles à obturer: d'une part celle de la grande cale
qui est située entre l'ouverture de la double échelle et les panneaux à
caillebotis du deuxième pont, et d'autre part celle du second panneau de la
grande cale qui est placé en arrière du sep de drisse.
Chacun
de ces panneaux est composé de deux éléments qui reposent sur les feuillures
des cadres correspondants, avec bien sûr à chaque fois quatre boucles pour
pouvoir procéder à leur manipulation.
Toutes
ces pièces ne sont pour le moment que posées et non collées, au cas où le
besoin se ferait sentir d'accéder au niveau inférieur pour une réparation
quelconque.
Enfin,
bien que la formation du clavecin ne soit pas encore décrite, je profite de ce
chapitre pour présenter dès maintenant l'étambrai du bas-mât d'artimon.
Il
est placé en arrière de la grande échelle destinée aux officiers et possède la
spécificité d'avoir une forme particulièrement allongée. En effet, sa partie
postérieure montre deux étroites fentes longitudinales dans lesquelles passent
les deux cordages qui viennent de l'extrémité de la barre du gouvernail et
remontent en direction de la double roue qui est située sur le gaillard
d'arrière.
Dans
le cas du Boullongne, les deux drosses sont ne sont pas protégées, alors que
sur un vaisseau de 74 canons, elles sont entourées par une sorte de petite
armoire verticale.
On
retrouve bien sûr les coins verticaux qui entourent la base du mât d'artimon,
puisque celui-ci repose dans sa carlingue qui est placée dans la boucherie sur
le plancher du deuxième pont.
Abordons à
présent la conception du clavecin, ce nom étant inspiré par le volume de la
suite des cabines des officiers, ce qui peut faire vaguement penser à la forme
de cet instrument de musique.
Dans
un premier temps, on va créer toute une série de cloisons dont les dimensions
sont telles qu'elles puissent pénétrer dans les rainures du plancher du second
pont. On remarque que les arêtes extérieures des angles de chaque cabine ont un
profil arrondi. Si on prend l'exemple du côté bâbord du vaisseau, on forme
ainsi successivement les cabines du premier lieutenant, du premier enseigne et
du premier enseigne surnuméraire.
En
procédant de la même façon sur tribord, on délimite les espaces des cabines du
capitaine commandant, du deuxième lieutenant et du deuxième enseigne.
Durant
toutes ces opérations, on aura laissé des panneaux de contreplaqué sur les
écoutilles de l'arrière du deuxième pont afin d'éviter les pénétrations de
poussières vers le niveau inférieur. On notera également que le cadre des
portes est laissé libre sur toute sa hauteur pour faciliter les manutentions
qui seraient rendues particulièrement délicates.
Il
s'agit maintenant d'équiper chaque cloison de ses nombreux accessoires: lit en
alcôve, armoire et caisson, bureau à l'anglaise, etc... De plus, la partie
extérieure de la cloison centrale des cabines du premier lieutenant et du
capitaine commandant est munie d'un ratelier pour les fusils qui seront
maintenus en place par une tringle de métal. Enfin, les éléments doivent être
entaillés pour permettre le passage des baux, barrotins et traversins.
On
forme également les moulures des cadres des portes et c'est ainsi que l'on
arrive à représenter l'ensemble des trois cabines sur le côté bâbord.
En
répétant cette opération sur tribord, on arrive finalement à la représentation
définitive du clavecin.
Une
ultime opération consiste à installer les portes des différentes cabines. Elles
seront montrées dans des situations diverses pour essayer de ne pas rendre la
vision de l'ensemble trop monotone.
Ce
travail de longue haleine permet d'envisager les aménagements de la grande
chambre, avant l'installation de nombreux personnages dans la zone allant du
grand cabestan à la poupe.
La comptabilité du
Boullongne fait désormais état de 43 526 chevilles et de 24 502 pièces.
Olivier Bello.